Malgré les mesures prises en urgence, le manque de personnels est criant que ce soit dans le premier comme dans le second degré. Cette réalité, camouflée derrière le recrutement de milliers de contractuel.les non formé.es ou encore le redéploiement de professeur.es remplaçant.es, illustre bien la crise de recrutement que rencontre l’Éducation nationale.

Cette crise est la conséquence des choix politiques qui se sont accentués ces dernières années engendrant dévalorisation, dégradation des conditions de travail et perte de sens des métiers de l’enseignement.

Il ne suffira pas de coller quelques rustines ici ou là pour faire fonctionner le système éducatif dans la durée. La crise est profonde et elle risque de s’accentuer si rien n’est fait. Formation initiale et continue, réformes pour permettre réellement la réussite de toutes et tous les jeunes, il faut revoir ce qui a été fait et qui ne fonctionne pas, à commencer par la mise en place d’une réelle politique nationale d’éducation prioritaire pour permettre une meilleure réussite des jeunes les plus éloigné.es de la culture scolaire, ceux et celles issu.es des milieux les plus populaires.

Il faut en urgence revaloriser l’ensemble des métiers de l’éducation pour en améliorer l’attractivité. Cela passe par de meilleures conditions de travail et par des augmentations salariales pour tous les personnels de l’Éducation Nationale. C’est dans ce cadre que la FSU appelle l’ensemble des personnels à se mobiliser le 29 septembre, à l’appel de l’interprofessionnelle.

Mais la politique que vous commencez à mettre en place, dès cette rentrée, n’est pas de nature à résoudre les problèmes. Les débats que vous entendez ouvrir au plus près des écoles et des établissements en associant parents, élu.es, collectivités, associations, entreprises portent même les risques d’une nouvelle déréglementation de l’école publique. Ces débats sont en réalité des prétextes à développer des expérimentations locales pour contourner les principes d’égalité et de laïcité de l’école républicaine.

C’est cette même méthode que le président Macron veut utiliser pour imposer l’augmentation des stages en entreprises en lycée professionnel !

L’exemple des propositions concernant l’enseignement professionnel illustre bien le modèle d’École que vous voulez développer. Façonner encore plus le système scolaire pour qu’il réponde aux besoins du marché de l’emploi quitte à creuser encore plus les inégalités. Abandonner l’idée d’une élévation de qualification de toutes et tous au bénéfice de l’acquisition de compétences utilisables immédiatement par l’entreprise et pour développer l’emploi sous qualifiés dans certains secteurs de l’économie. Mettre au travail de plus en plus tôt une partie de la jeunesse pour essayer de répondre rapidement à la pénurie de main-d’œuvre au détriment de leur formation.

Le président et votre ministre déléguée à l’enseignement et la formation professionnels Carole Grandjean, en se fixant comme objectifs de rapprocher l’enseignement professionnel du modèle de l’apprentissage, entament, de fait, une réelle entreprise de démolition des lycées professionnels. Pour cela, ils ont commencé une véritable campagne de communication calomnieuse à l’encontre des lycées professionnels et de leurs enseignant.es. Pour faire passer leur future réforme, ils tentent de faire croire que l’on réussirait mieux en apprentissage et que l’entreprise serait plus formatrice que le lycée professionnel.

En voulant faire de celui-ci, le terrain de toutes les expérimentations possibles, en développant l’autonomie donnée aux chefs d’établissement, c’est effectivement le modèle de l’apprentissage qui est développé. Demain ce qui est à craindre, c’est la disparition d’un cadrage horaire par disciplines d’enseignement, une adaptation locale des contenus d’enseignement et une gestion des personnels par les chefs d’établissement avec un recours croissant aux contractuel.les notamment par le retour des professeur.es associé.es, des professionnel.les intervenant tout ou partie de l’année dans l’établissement.

L’augmentation du temps de stage est imposée ; une année entière sur les 3 années du cycle BAC PRO, pour pallier le plus rapidement le manque de main-d’œuvre dans certains secteurs et dans une logique d’abaissement du « coût » du travail et de recrutement des salarié.es. Il permettra au passage de faciliter la mise en place du mixage des parcours et des publics pour continuer à développer l’apprentissage. Cette réforme détériorera la qualité de la formation et limitera les poursuites d’études dans le supérieur, elle éloignera un bon nombre de jeunes de la qualification. Elle accentuera le décrochage, augmentant une fois de plus le nombre de jeunes ni en emploi ni en formation.

Faut-il rappeler que malgré les milliards d’argent public investis sur la formation des jeunes à travers le plan « un jeune, une solution » la situation des jeunes les plus éloigné.es de la formation et de l’emploi reste préoccupante.

Le nombre de NEET ne diminue pas et reste aux alentours de 12 % des 16-25 ans. La DARES, dans une enquête récente, révèle ainsi que si le nombre d’entrées en formation augmente globalement, le profil des jeunes concerné.es par les dispositifs de formation n’a pas changé : parmi les entrants en Garantie Jeunes et en insertion par l’activité économique (IAE), des dispositifs ne proposant pas réellement de formation qualifiante, les moins diplômé.es et celles et ceux issu.es des quartiers prioritaires de la politique de la ville, restent davantage représenté.es. En fait, les nouveaux contrats d’alternance bénéficient avant tout à des jeunes déjà diplômé.es et plus âgé.es que précédemment. Une grande partie du financement de ce plan a principalement permis de financer le développement de l’apprentissage, créant un véritable effet d’aubaine pour les entreprises qui ont pu faire travailler des jeunes gratuitement. C’est ce modèle, coûteux pour les pouvoirs publics, qui n’a pas réellement eu d’effet sur l’amélioration de la formation et de l’insertion professionnelle des jeunes, puisqu’il a profité aux plus diplômé.es (donc à celles et ceux ayant le moins de problèmes d’insertion), que vous voulez imposer au lycée professionnel.

Ce n’est pas moins de formation mais plus de formation qu’il faut !

Pour cela, l’urgence est de repenser l’ensemble des dispositifs d’accompagnement et de formation des jeunes et leurs financements afin de permettre un accès à la formation à toutes et tous les jeunes dans de bonnes conditions, en ciblant en priorité celles et ceux qui en ont le plus besoin.

Pour cela, il faut permettre à l’ensemble des jeunes qui sont en étude et en formation de poursuivre leur cursus dans des conditions de vie acceptables et égalitaires.

Pour cela, il faut redonner les moyens à l’École de scolariser toutes et tous les jeunes en leur permettant d’atteindre à minima un premier niveau de qualification.

Pour cela, la FSU prône une scolarité obligatoire jusqu’à 18 ans sous statut scolaire.

Cette nouvelle réforme, si elle était mise en œuvre, conduirait à un véritable retour en arrière, assignant et formatant les jeunes issu.es des milieux modestes à des postes peu qualifiés sans possibilité d’évolution. Ce choix politique aggraverait encore plus les inégalités scolaires, sociales et territoriales.

La FSU s’y opposera avec force et détermination.

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