Ces deux décrets viennent empêcher le législateur de jouer son rôle constitutionnel de protection des libertés, alors que la commission des lois de l’Assemblée nationale avait adopté une proposition de loi encadrant la création des fichiers de police. Cette manœuvre en dit long sur le mépris des droits du Parlement que l’on disait vouloir revaloriser. Sur le fond, ces deux décrets, même s’ils traduisent certains reculs face à la mobilisation de 2008 (renonciation au fichage de la vie sexuelle et au mélange des finalités dans un même fichier), sont entachés des mêmes violations des libertés fondamentales que leurs prédécesseurs.

En effet, malgré l’immense flot de réactions contre l’ex-décret EDVIGE, (la pétition unitaire avait rassemblé près de 250 000 signatures individuelles dont plusieurs centaines pour la Nièvre et 1300 organisations), le gouvernement, en dépit des annonces qu’il avait pu faire à cette époque, a décidé une fois de plus de contourner le débat démocratique et la voie parlementaire en utilisant la voie administrative.

Malgré la suppression de quelques dispositions très contestables du décret EDVIGE, suppression directement obtenue grâce à la mobilisation, les deux nouveaux décrets permettront un fichage :

"-" sur des présomptions et non sur des actes, ce qui constitue une remise en cause profonde des règles de base du droit français.

"-" des mineurs de 13 ans dans le cadre de la présomption d’atteintes à la sécurité publique et des mineurs de 16 ans pour ce qui est des enquêtes administratives (malgré les recommandations exprimées par le comité de suivi de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant sur le fichage et le recueil de données concernant les enfants)

"-" de données sensibles comme les activités publiques et les motivations syndicales, politiques, philosophiques ou religieuses,

"-" des origines géographiques (qui remplacent les origines ethniques), ouvrant ainsi la voie à la stigmatisation de populations.

Les organisations nivernaises ci-dessous estiment que l’article 3 du décret 2009-1250 du 16 octobre 2009 relatif aux enquêtes administratives liées à la sécurité publique pose de sérieuses questions en matière de respect des droits démocratiques. Ainsi, concernant les emplois participant à l’exercice des missions de souveraineté de l’Etat, il est inacceptable que, a priori et de façon générale, une motivation syndicale, politique, religieuse ou philosophique puisse servir de point de départ pour déterminer un comportement incompatible avec l’exercice des fonctions ou des missions envisagées.

De même, il faut écouter l’avis émis par la CNIL dans sa délibération 2009-356 quant à la mention d’une nouvelle catégorie de données « activités publiques », selon laquelle la nature exacte des données susceptibles d’être enregistrées sous cette catégorie devrait être mieux définie.

Les organisations nivernaises exigent le retrait de ces textes, et continuera à s’associer aux actions et éventuels recours collectifs en annulation devant le Conseil d’Etat. Elles appelle à participer aux mobilisations qui se construisent contre ces décrets, et pour la mise en place d’un débat démocratique sur la question du fichage.

Les organisations signataires : UD CGT – UD FO – UNSA – FSU – Solidaires – fédération PS Nièvre – LDH Clamecy et Haut Nivernais – Parti de gauche – PCF – NPA 58